Le bilan attaque la concurrence

Presse économique Avec sa nouvelle formule de parution, Bilanz veut se relancer et mener la vie dure à la concurrence.

Presse économique Avec sa nouvelle fréquence de parution, Bilanz veut se relancer et mener la vie dure à ses concurrents.A partir de janvier, les deux magazines sur papier glacé de l'économie, Bilanz (Jean Frey) et Bilan (Edipresse), veulent doubler leur rythme de parution et être lancés tous les quinze jours. "Nous allons diviser le menu journalistique actuel en deux plats", explique René Lüchinger, rédacteur en chef de Bilanz. En conséquence, les numéros seront un peu plus minces et passeront de 120 pages rédactionnelles actuellement à 90 en moyenne. Selon Lüchinger, l'objectif n'est pas de "faire de la lecture", mais de maintenir la qualité et la profondeur journalistiques actuelles, de fournir le magazine mensuel pour l'élite de l'économie pour ainsi dire toutes les deux semaines. Un initié estime que les médias économiques doivent aller très mal pour qu'une telle mesure soit nécessaire. En effet, au cours des douze dernières années, les rédacteurs de Bilanz ont calculé quatre à cinq fois le scénario et ont à chaque fois jugé les risques trop importants. Après que Bilanz n'ait pas réussi à briser la tendance négative persistante de la presse économique avec une relance début 2003, le moment est manifestement venu. Les campagnes publicitaires à cycles courts sont le moteur économique de cette démarche. En effet, lorsque Swisscom, par exemple, voulait faire de la publicité six fois en deux mois, elle passait dans la presse hebdomadaire.
Il ne fait aucun doute que le nouveau bilan va renforcer la concurrence. Andy Lehmann, Managing Director d'Aegis Media Group Switzerland, déclare : "Nous verrons dans quelle mesure l'augmentation de la fréquence de parution entraînera également des décalages sur le marché de la lecture. Il est possible qu'un futur abonné fasse l'économie d'un hebdomadaire". Pour Cosima Giannachi, directrice de Mindshare, il ne fait aucun doute que le nouveau bilan absorbera les recettes publicitaires des titres financiers comme Cash et Finanz und Wirtschaft. "Ceux-ci perdront un à deux passages par campagne publicitaire", estime-t-elle.
Dietmar Bemberg, Managingpartner d'Optimedia et de BG Media, considère certes la démarche des deux titres comme courageuse dans la situation économique actuelle, d'autant plus que des annonceurs solvables comme les grandes banques n'ont pas encore augmenté leurs budgets publicitaires. "Mais il ne faut pas s'attendre à une euphorie", estime-t-il.
Christof Kaufmann, CEO de l'agence média OMD Schweiz AG, se montre sceptique. "Je pars du principe que la maison Jean Frey a fait ses calculs et que les revenus supplémentaires générés par les annonces sont plus élevés que les coûts supplémentaires liés au nouveau rythme de parution", dit-il. Mais selon lui, le marché des annonces est en baisse dans les deux segments dont le lectorat est
de la concurrence.
Dans le segment des services financiers, le journal est, selon Kaufmann, en concurrence avec Cash, NZZ,
Finanz und Wirtschaft ainsi qu'avec le HandelsZeitung. Dans le segment des produits de luxe comme les montres, les parfums, la mode et les voitures, qui vise les particuliers, sont par exemple actifs Weltwoche, Sonntagspresse et Facts. Kaufmann s'attend à ce que tous les titres perdent des plumes, y compris la Sonntagspresse. Kaufmann estime que Facts est particulièrement menacé. "Au vu du nombre d'annonces, je ne peux pas m'imaginer que Facts soit actuellement dans les chiffres noirs", estime-t-il. Pour Cash également, dont le format est en décalage avec le paysage, il faut impérativement faire quelque chose.
Le rédacteur en chef de Cash, Dirk Schütz, a donc perçu "avec une certaine surprise" la décision de Bilanz, dont il connaît de l'intérieur les moquettes en tant qu'ancien rédacteur en chef adjoint. Il estime que le rythme bimensuel est "anormal" et souligne que le changement du magazine économique allemand Capital, l'ancien modèle de Bilanz, est considéré comme une mauvaise décision dans la branche. Schütz est désormais épaulé par Bruno Affentranger, qui était jusqu'à présent membre de la rédaction en chef de Bilanz et qui est désormais rédacteur en chef adjoint de Cash.
Pour Affentranger, le facteur principal n'est pas le rythme de parution, qui se décide en fin de compte au kiosque. Si les recettes et les coûts supplémentaires devaient s'avérer être un jeu à somme nulle, le projet serait un échec. Contrairement à la plupart de ses collègues, il ne craint pas que la presse économique ne se consolide davantage, car les titres sont tous encore présents sur le marché : "La question est de savoir si l'on peut compenser les fluctuations conjoncturelles en cas de baisse des recettes par une diminution des dépenses".
"Mais il ne faut pas s'attendre à une euphorie "Dietmar Bemberg,
Optimedia
"Je suppose que le calcul a été fait".
Christof Kaufmann, CEO d'OMD Suisse
"Il est possible qu'un abonné fasse l'économie d'un magazine hebdomadaire".
Andy Lehmann, Aegis Media Group
"Nous allons diviser le menu actuel en deux plats".
René Lüchinger, rédacteur en chef de Bilanz
Estime que le rythme bihebdomadaire est "contre nature". Dirk Schütz,
Rédacteur en chef de Cash
"Les titres financiers vont perdre un ou deux circuits".
Cosima Giannachi, Mindshare
René Worni

Plus d'articles sur le sujet